Aux Yeux De Safre

Aux Yeux De Safre

Ragdoll

Couleurs, vous avez dit couleur ... Mink, tradi, guéguerre de clocher

Couleurs, vous avez dit couleur ... Mink, tradi, guéguerre de clocher

Le Ragdoll, origines et temps futurs, quelques réflexions…
 
On ne va pas revenir sur les légendes diverses et variées, les rumeurs et les interprétations toutes personnelles. Pour cela, les sites ne manquent pas … chacun sa sauce pour légitimer ses choix.
Nous ne reprendrons que des éléments factuels :
1- Le Ragdoll est un chat de race …
2- Tous les chats de race sont soit issus d’un brassage géographique sélectionné par Dame Nature de chats semi-sauvages (maine coon par exemple) repéré par des esprits vifs, soit d’un brassage créé de toutes pièces par la main de l’homme entre des chats d’autres races ou des chats « de gouttière » présentant des caractéristiques ou des mutations particulières et entretenues désirables, ou indésirables (comprendre une tare : le sphinx par exemple, et malheureusement pour lui …) ! Et nous allons y revenir.
3- Tout élevage de race induit une forte consanguinité aux origines de la sélection. Se dire choqué qu’une race soit issue de très peu de sujets au départ est sinon absurde, du moins malhonnête. En revanche, il appartient à chacun d’identifier quand des sujets extérieurs à la race ont été incorporés à des sujets fixés issus des croisements hyper-consanguins d’origine, pour apporter variabilité génétique et sang neuf, et de revoir à partir de là ce qu’est le point de départ de la race telle qu’elle a ensuite été escomptée, définie ou cadrée par ses créateurs.
4- Le Radgoll est en l’occurrence issu du croisement entre une chatte blanche « floppy » et quelques autres, plus ou moins avec « papiers », et en l’occurrence personne n’est d’accord sur quels papiers pour quelles races, le cas échéant …
5- Les pedigrees remontent à la « fondation » et chaque chat répertorié « ragdoll » est identifié par son phénotype, la génétique de l’époque étant à ses balbutiements, sans pour autant être toujours issu que de ragdolls (même si d’ailleurs le contraire est indiqué, magie des déclarations papiers). Voir Chérubims et consorts ...
6- Certaines des premières identifications de phénotypes permettent d’avérer la présence de couleurs aujourd’hui non reconnues par les instances conventionnelles[i], bien que présentent aux origines, et même parfois photos à l’appui. Exemples :
                              a.  Joséphine, chatte blanche, poil longs. Certains diront que c’est une persane, l’hyper-type n’étant pas encore marqué … On distingue des reflets, elle était peut-être van. Quoiqu’il en soit, elle eut des bébés noir (solid) et colorpoint, visiblement (si ce sont bien tous les siens sur la photo).
                              b. Blackie a engendré, avec Joséphine, Buckwheat (traduction : sarrasin) : une chatte brun/noir, ressemblant à une femelle Burmese. On notera sur la photo le chaton de Buckwheat, dans l’angle inférieur gauche, clairement porteur sepia ou mink. Cela aussi est factuel. Certains y voient du fumé (silver, smoke) … Je dirai qu’ils sont doués, il y a plus de reflets crème sur Joséphine que de reflets brun sur Buckwheat … Exit le tabby ?? Mais si cela peut leur faire plaisir … et agrémenter leur business de « couleurs rares » en taxant les minks et les sepias de « couleurs sales », on les laissera dire …
 

suite

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                             c. Tiki … Cette chatte a été enregistrée seal point/dark leg. Pourtant, Ann Baker déclarait qu’elle était chocolat.
Cela parait peu probable : son frère, enregistré seal, si les deux parents n’étaient que porteurs, aurait dans ce cas eu 50 % de chances de porter le chocolat et 25% de chances de ne pas le porter du tout, que nous portons à 50% si on admet qu’il ne l’était pas carrément (25% de chances au départ).
Frère et sœur ont été mariés ensemble, ils eurent 5 chatons, tous seal. Or si Tiki était chocolat, ces 5 chatons auraient dû tous être porteurs par leur mère et avaient, si on admet que le frère n’était pas choco :
-100% de chances d’être porteurs si leur père n’était pas même porteur
-50% de chances d’être porteurs si leur père était porteur
-50% de chances d’être choco si leur père était porteur
Soit un total de chances d’être au moins porteurs de 75% et 25% d’être chocolat.
Sauf que remarié avec sa mère, l'un des 5 ne produisit aucun chaton chocolat. Marié également à sa propre demi-sœur et nièce, ainsi qu'à 2 de ses propres sœurs, aucun chocolat ne réapparu. Cela reste possible, si Ann Baker à joué de malchance, les statistiques ne s’imposant pas toujours aux les volontés arbitraires de Dame Nature. Mais peu probable.
Là où ça devient drôle, c’est que du « chocolat », Pecos Bill, 1969, sort de Tiki avec un petit fils de Tiki (Thumper), 3 fois issu pour sa part de Buckwheat, sans aucun autre choco déclaré que Tiki elle-même, sur 5 générations.
En revanche, si Tiki était non pas chocolat mais mink ou sépia, le débat est tout autre ! Le gène chocolat est récessif. C’est un fait. Le gène solid, lui, est dominant. C’est un fait. L’allèle Sepia est dominant sur l’allèle Point. Ainsi, Tiki aurait pu exprimer un point « nuancé » en étant tout au plus porteuse. Si son frère ne l’était pas, 50% des chatons ne l’auraient pas été non plus. Et toujours parce que Dame Nature est parfois capricieuse, il est tout à fait envisageable que sur 5 chatons, aucun ne soit sorti porteur.[ii]
                             d. Si les pedigrees d’Ann Baker sont exacts, alors Buckwheat était en sus porteuse tabby, donc peut-être Blackie ou Joséphine également (ou les deux). Mais c’était également le cas de Daddy Warbucks, père de Tiki, également issu de Joséphine. Le père de celui-ci, Beauty, n’est pas phénotypiquement identifié.
                             e. Je ne connais pas de chats roux ou reds dans les toutes premières générations. Kilo II est certes la fille de Toy Sue, effectivement ragdoll remontant totalement aux origines, mais son père, Kilo, est un mâle aux origines inconnues. Née en 1978, Kilo II est donc une retrempe d’Ann Baker. Il est cependant acceptable de dire que si c’est Ann qui l’a fait, alors c’est que c’est une volonté d’accepter le roux.


7- Si reconnaitre le van est une volonté de créer un monument à la mémoire de Joséphine, alors cela pose question, Ann Baker ayant tout fait, visiblement, pour apporter de la couleur …. Et on pourrait presque dire « toutes les couleurs » sauf blanc archi blanc … soit le blanc envahissant, que seuls des néophytes ignorants en génétique peuvent produire involontairement, cet envahissement étant parfaitement évitable … Quant à le produire volontairement, pourquoi pas, mais alors …


8- … il faut aussi accepter le solid, en mémoire de Blackie et Burkwheat, s’agissant du même gène que le point, à l’autre bout du panel de déclinaison, comme le van l’est au blanc, le sepia et le mink étant visiblement là depuis de le départ, entretenus d’ailleurs, tandis que le blanc, lui, ne l’a clairement pas été par Ann. A chacun de savoir les travailler pour ne pas s’enfermer. C’est aussi ça, être éleveur … Pour conclure sur le solid, mink, sepia, comment imaginer que les premiers radgolls, issus, entre autres, de burmese et de siamois, n’en aient pas été porteurs ? Qui peut décemment croire cela [iii]?
9- Le colorpoint est la combinaison cs/cs sur le gène C. Or on sait que cs et c (albinos) sont intrinsèquement liés à un défaut de l’œil, non musculaire, qui entraîne un strabisme chez TOUS les chats cs/cs. Ceci est dû à un déficit de mélanine, laquelle permet la migration des pigments et par eux celle des fibres nerveuses. Ce strabisme n’est pas toujours visible, mais il contraint le cerveau de tous les chats colorpoint, toutes races confondues, à pallier à défaut de transmission de l’information des yeux. La plupart des cerveaux arriveront à faire ce travail de compensation, mais un certain nombre de chats auront un strabisme visible. En gros, tout colorpoint voit moins bien qu’un non colorpoint. Il a des yeux bleus magnifiques, certes, mais quelque soit la façon dont on prenne la question, le cs/cs entraîne une anomalie génétique, en d’autres termes, une tare.  Un chat « juste porteur » cs (non homozygote donc) n’aurait pas ce problème. Aussi, les yeux verts d’eau, ou bleu turquoise, d’un mink ou d’un sépia, portés par les allèles C et Cb, fort beaux eux aussi, évitent ce déficit de mélanine et « rendent la vue ». Or phénotypiquement, Cs est codominant avec Cb : il se voit, esthétiquement, il « imprègne », il « imprime ». Ne peut-on pas se satisfaire déjà d’un « simple » porteur ? Ethiquement, élever consistant à améliorer les races, et pas seulement d’un point de vue d’une lubie esthétique, mais également quant à la bonne santé des animaux que l’on produit, est-il moral de produire des homozygotes déficients pour un bleu plus profond, quand le statut de porteur est suffisant pour avoir du « déjà » bleu sans pour autant contraindre des chats à loucher ou risque de loucher pour compenser, toujours, un défaut du nerf optique ?
 
Finalement, un Ragdoll, c’est avant tout un particularisme de caractère, qui tient en un mot : floppy (souple en français), avec une répartition de couleur selon le patron colorpoint/mitted/bicolore/van. ET CE N’EST « QUE » CELA … et c’est déjà énorme !


On pourra se demander si ce caractère « floppy » est lié à l’allèle cs, toujours quant au rôle de la mélanine dans la migration des fibres nerveuses. A priori, les siamois et autres porteurs classiques du colorpoint n’étant pas réputés pour ce caractère si particulier d’être « floppy », on peut estimer que non. Faute d’études scientifiques sur cette caractéristique principale du ragdoll, qu’elles soient comparatives avec les autres races colorpoint ou centrée sur la race elle-même, il faudra se contenter de cette réponse.


En faire un «vulgaire » Sacré de Birmanie (en gros, variante du siamois, seal ou bleu à poils longs) avec pour seule différence le toboggan du nez, est d’une tristesse immense. A fortiori que le birman était très confidentiel à l’époque d’Ann Baker et que ça signifierait qu’en réalité, le Ragdoll n’est que le fruit de la méconnaissance du Birman … Un comble quand on connait le caractère réputé unique du Ragdoll et les couleurs valables aux origines.
Ne pas sélectionner en caractère est donc la pire erreur d’un éleveur de Ragdolls aujourd’hui. Et ça, c’est de la responsabilité de tous, le caractère n’ayant pas de mention particulière sur un pedigree pour signaler sa conformité.


Se buter sur une couleur, que ce soit de robe ou des yeux, parce qu’on ne sait pas travailler sans perdre telle ou telle autre couleur en s’enfermant dans un hyper-type, est la solution de facilité la plus dévastatrice pour la richesse génétique et la santé à terme d’une race dont certains se satisferaient qu’elle n’ait que 3 individus pour point (sans jeu de mot …) de départ. Auquel cas, il ne faudrait pas taper trop fort sur le Ragamuffin, qui, comme le Thaï, véritable Siamois d’origine usurpé par un anorexique sans rondeur, serait le véritable Ragdoll. Mais l’enfermement en la demeure est à l’échelle DES éleveurs, et non des choix individuels, chacun ayant le droit d’avoir des préférences.
Pour conclure, le Ragdoll est une race très récente, d’à peine un demi-siècle. Dans de nombreuses races félines ou canines, avoir aussi peu de recul interdirait la « sélectionnite aigüe restrictive », qui enferme ces races et les condamne à un appauvrissement génétique néfaste, qu’une dépression de consanguinité ne manquerait pas de provoquer. Sélectionner avec tolérance et bienveillance, sans jamais perdre de vue que les origines de la race sont totalement mystifiés par Ann Beker et n’ont été que partiellement reconstitués par la suite interdit d’avoir des certitudes et des idées bien arrêtées.


En conséquences, la Chatterie des Yeux de Safre fait le choix de s’écarter des conceptions étriquées et potentiellement erronées voire dangereuses à long terme. Nous ne limiterons pas le Ragdoll à 3 couleurs, 3 patrons.
Nous travaillons, pour notre part, le Seal, le Bleu, le Chocolat, le Solid (donc aussi le mink et le sepia), et, si l’occasion se présente, le Tortie (ou roux). Nous travaillons toutes leurs déclinaisons.
Par choix, nous tendons à éviter rigoureusement de produire le van. Concernant le Solid CC (ou solid black), nous nous réservons la possibilité de le travailler si nécessaire avec un reproducteur, tout en sachant que nous entretenons l’absence des yeux cuivrés dans notre production, et privilégions l’allèle Cb, C étant dominant.
Parce que nous estimons que la mélanine a son importance, nous ne produisons pas de chats hight white ou van.
Par choix encore, nous ne travaillons pas le Tabby, et de fait nous ne travaillons pas non plus le Silver. Le caractère dominant de l’allèle A n’a pas notre sympathie, et son apparition étant aux origines de la race, nous ne sommes pas certains qu’il ait été un vœu pieu d’Ann Baker, contrairement au Tortie, et qu’elle n’ait pas tenté de le faire disparaître finalement. D’autres se chargent fort bien de l’entretenir de toute façon ... ;)

Texte : tous droits réservés

Notes

Notes

[i] - Nous ne parlons pas de ragdoll traditionnel ou d’instance du radgoll traditionnelles, mais de ragdoll conventionnel ou d’instances du ragdolls conventionnelles pour désigner ceux qui ne travail que le point seal et bleu. Ce terme expose mieux la nuance, avec ce que, nous concernant, nous estimons produire, à savoir du ragdoll   authentique.
[ii] - Or si on regarde Blackie et Buckwheat, l’hypothèse du solid, sepia et mink est ainsi largement à privilégier, dans l’hypothèse que Tiki ait bien eut une robe nuancée (ce que d’après photo à peine colorisée, bien malin celui qui pourrait se prononcer …). Sans compter que, Ô magie des archives photos!, on sait que Buckwheat avait les yeux cuivrés.
Quand on connait les variations solid, sepia, mink, solid sepia et solid point, on peut finir par se demander si le choco d’Ann Baker n’était pas plutôt du sepia, et qu’elle ne discernait pas le mink du seal …
 
[iii] - Pour illustrer, de notre point de vue, le propos :
En avril 1979, voilà une affiche de 3 nuances de ragdolls, de la Chatterie Ragnarok. La photo en noir et blanc est bien "pratique" aujourd’hui, mais personne ne nous interdira de poser, a minima, la question du mink pour le chat de droite.