Aux Yeux De Safre

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Ragdoll

Notre position sur la stérilisation précoce.

Notre position sur la stérilisation précoce.


La stérilisation précoce a toujours été controversée, particulièrement en Europe, et des données récentes viennent remettre en cause les bénéfices systématiques du recours à la gonadectomie chez le chien et le chat (voir Gonadectomie chez le chien et le chat / Emmanuelle Titeux, Le Point vétérinaire, 419-420, Juillet-août 2021).

Si ces bénéfices existent, ils ne doivent pas occulter les risques.

Les effets délétères déjà connus ou suspectés jusqu'à récemment :


Sur la croissance :
La croissance osseuse en longueur se fait jusqu’à la puberté, aux plaques de croissance, sous l'influence des hormones gonadiques (testostérone et œstradiol)(Murray et Clayton 2013). Une absence de ces hormones conduit à une perturbation du développement osseux et la fermeture des cartilages de croissance étant retardée par l'absence de puberté, les chatons stérilisés précocement dans une portée grandissent plus longtemps que ceux qui l'ont été plus tard.
En effet, plusieurs études ont démontré que la gonadectomie précoce des chatons est responsable d’un retard de fermeture des plaques de croissance (Houlton et McGlennon 1992). La croissance prolongée induite donnerait des silhouettes agrandies de plus de 9% chez les femelles stérilisées précocement par rapport aux femelles intactes. 
L’impact de la stérilisation précoce sur la prédisposition aux fractures n’a fait l’objet que d’une seule étude. Elles seraient une complication rare, potentiellement consécutive à la fermeture retardée des plaques de croissances (McNicholas et al., 2002).
Le rapport risque-bénéfice nécessiterait davantage d'études pour confirmer si une croissance plus lente et une augmentation de la longueur des os sont sans conséquences ou délétères pour la santé et le bien-être félin. 


Les calculs urinaires chez le mâle :
La castration précoce du chat mâle a longtemps été accusée de favoriser l’apparition de calculs urinaires, par diminution du diamètre de l’urètre (conduit reliant la vessie au méat urinaire).
Si la castration précoce ne serait pas en elle-même la cause d'un risque supplémentaire de calculs urinaires, concernant l’incidence de la stérilisation précoce dans le syndrome urologique félin, elle entraîne une diminution du développement du pénis, avec des différences du diamètre de l’urètre au niveau pré-pelvique. Ce moindre développement du pénis n'aurait pas de répercussion pathologique, mais rendrait le sondage urinaire plus délicat pour le vétérinaire (une étude montre qu’à 22 mois, sur des chats castrés précocement, l’extériorisation du pénis est plus difficile).


Le système urogénital de la chatte :
La stérilisation précoce entraîne des défauts de développement des organes génitaux externes, puisque évidemment, les hormones gonadiques jouent un rôle dans ce développement.
Ainsi, les chattes stérilisées en bas âge présentent une vulve réduite par rapport aux chattes stérilisées
à un âge classique et à celles restées intactes (Stubbs et al. 1996). 
En ce qui concerne le système urinaire, une étude a mis en évidence une réduction significative du diamètre urétral pré-pelvien chez les chattes ayant subi une stérilisation à 7 semaines (Root et coll., 1996). 

Au niveau comportemental : 
Chez les chats stérilisés avant 5 mois, il a été constaté une diminution de l'activité et une augmentation de la timidité envers les étrangers et l’environnement.(Howe et al., 2000 ; Spain et al., 2004a).

Sur l'immunité :
L’anesthésie générale et la chirurgie ont un effet immunosuppressif , c'est-à-dire un impact négatif
sur l’immunité des jeunes chatons. 
La stérilisation précoce induit une réponse immunitaire plus forte et plus réactive à la
stimulation antigénique. Les réactions d'hypersensibilité consécutives à la vaccination sont plus fréquentes chez les femelles et les individus stérilisés (Gaillard et Spinedi 1998). 
Ceci n'est pas sans conséquences à la période de primo-vaccination. Si les auteurs recommandent de laisser un délai d’une dizaine de jours entre la stérilisation et la vaccination (Kona-Boun et al., 2005), il n'y aucune donnée quant aux pathologies qui, liées à un stress environnemental et psychologique, comme la PIF par exemple, pourraient être susceptibles d'apparaître par l'enchaînement vaccination-stérilisation. 


Le professeur Alain Fontbonne, diplômé du Collège européen de reproduction animale, maître de conférences dans l'Unité de médecine de l'élevage et du sport de l'école vétérinaire d'Alfort, déclare, dans la Dépêche Vétérinaire n° 1486, dans un article sur le sujet :

"Sur le plan médical, elle est remise en question par certains éthologues et suspectée de générer des affections et d'entraîner, chez le chat notamment, des troubles du développement et de la socialisation, potentiellement gênants pour l'adaptation des chatons à leur nouvel environnement.
Chez les chats de race, la stérilisation précoce, avant 3 mois, n'est pas forcément une méthode parfaite, d'autant qu'elle risque de diminuer la variabilité génétique dans les races à faible effectif (pool de géniteurs disponibles plus faible)."

 

Nous partageons totalement cet avis.

Dans le cas du Ragdoll.

Le Ragdoll est une race dite "géante". À croissance lente et prolongée (elle se termine vers 3 ans), ajouter un délai dû à un retard de la fermeture des cartilages de croissance nous semble une prise de risques inutile.
Ce à quoi s'ajoute la question de sa surprenante élasticité, à laquelle il doit son nom. Ce particularisme, particulièrement prégnant dans la jeunesse du Ragdoll (ce qui peut questionner sur l'influence hormonale), n'est jamais observé dans le cadre des études sur la stérilisation précoce. 

Le Ragdoll est sujet à des affections urologiques, auxquelles les tests génétiques ne répondent pas en termes de prévention et de sélection (pour rappel, le test de la PKD n'est pas validé pour la race, voir notre article sur le sujet). Or d'une part, les études ne s'attardent que sur les affections vésicales, non sur les affections rénales. D'autre part, notre expérience en matière de calculs rénaux (urolithiases) chez les mâles toutes races confondues nous intiment la prudence devant la fréquence des cas chez les mâles stérilisés, car nous ne connaissons que trop bien l'importance de pouvoir sonder l'animal sans blesser, sachant qu'il n'est pas possible de le faire fréquemment au cours de sa vie.

Enfin, concernant la question de l'immunité, au regard du risque déjà évalué par ailleurs de mutation du coronavirus entérique félin en PIF dans la race, nous estimons qu'un choc opératoire, psychologique et immunologique à distance rapprochée de la vaccination puis du changement de propriétaire est une succession d'évènements potentiellement délétère qui ne se justifie plus, a fortiori lorsqu'elle est psychologiquement majorée par les effets connus de la stérilisation précoce sur la timidité.

Nous attendons de pouvoir prendre connaissance des dernières études, qui sembleraient pouvoir nous conforter dans notre opposition à la stérilisation précoce des chatons.


En conséquences, pour nos adoptants :

Nous sommes, pour notre part, adeptes du principe de précaution et opposé, pour la race Ragdoll, à la stérilisation précoce.
De fait, nous laissons partir les chatons entiers.
En revanche, nous vendons les chatons avec deux objets de destination distincts, selon l'usage que l'acheteur déclare vouloir en faire  : pour compagnie ou pour reproduction.

Mais tous nos chatons sont vendus au même prix, quelle que soit leur destination, considérant que seule la stérilisation de l'animal peut factuellement entériner sa destination finale. 

Aussi :
- comme la valeur d'un chaton pour reproduction est supérieure à la valeur d'un chaton pour compagnie  (les garanties sont différentes, les recours sont différents, etc ...),
- considérant que les particuliers sans numéro d'éleveur ou de SIRET au jour de la vente ne sont a priori légalement pas autorisés à pratiquer la reproduction, 
- considérant que seul un avis vétérinaire est légalement opposable sur le choix de faire stériliser ou non un animal au regard des avancées scientifiques générales et du cas particulier de l'animal dont il a le suivi,
- et considérant que le souhait du propriétaire ou celui de l'éleveur ne peuvent à eux-seuls déterminer de la stérilisation future de l'animal, 

=> la vente des chatons sont réalisées contractuellement sous clause résolutoire qu'une stérilisation intervienne avant le premier anniversaire de la vente, généralement à la puberté (6 à 8 mois), de sorte que les particuliers désireux d'acquérir un animal pour compagnie puissent bénéficier d'une réduction sur le prix de vente, d'un montant convenu au jour de la vente. 

Un échéancier accompagne chaque contrat de vente, avec une échéance fixée la veille du premier anniversaire de celle-ci, laquelle ne pourra être exigée que si l'animal n'a pas été stérilisé dans l'intervalle. Les propriétaires pourront justifier pendant l'année de la stérilisation du chaton au moyen d'un certificat vétérinaire pour faire valoir la clause résolutoire et demander la réduction du prix contractuelle. Dans le cas d'un règlement anticipé par chèque, le chèque pourra être annulé, détruit, et/ou retourné à l'émetteur.